Écrire l’histoire environnementale au xxie siècle : sources, méthodes et pratiques – Colloque international du RUCHE – Lyon, 13-15 juin 2018 – Appel à communications
Relations de l’homme à son environnement naturel et aux autres êtres vivants ; production et traitement des déchets ; mobilisation et consommation de l’énergie ; nuisances et pollutions industrielles, agricoles et domestiques et leur impact sur la santé et les milieux ; usages et gestion des forêts, des littoraux, des espaces montagnards, des zones humides et des communs ; environnement urbain ; relation aux rivières ; environnementalisme ; catastrophes naturelles ou d’origine anthropique, climat, impact des grands aménagements… Les objets de l’histoire environnementale sont variés et les méthodes pour les aborder ne le sont pas moins. Depuis une douzaine d’années maintenant, les travaux et les publications d’histoire environnementale se sont multipliés en France, les contacts avec les chercheurs et les chercheuses d’autres pays travaillant dans ce champ également.
Certains des objets qu’elle étudie étaient, certes, considérés depuis longtemps par la géographie, l’histoire rurale ou d’autres disciplines, mais les questionnements ont été renouvelés et élargis, notamment à la lumière des problèmes de « soutenabilité » que posent les choix techniques et les modèles économiques de développement apparus à la fin du XVIIIe siècle, intensifiés et mondialisés au XXe siècle. Face à des questions aussi complexes, les chercheurs en histoire environnementale savent qu’aucune discipline ne peut prétendre, à elle seule, faire le tour des problèmes ni répondre à toutes les questions. Pluri- ou interdisciplinarité sont ici plus indispensables encore que dans d’autres domaines de la recherche en histoire. Interdisciplinarité entre sciences humaines et sociales, mais aussi entre disciplines relevant de traditions encore plus éloignées : sciences de la vie, de la nature, de la matière.
Pour ne prendre qu’un seul exemple, peut-on écrire l’histoire des pollutions induites par certaines activités humaines séculaires, la nature de leurs rejets dans l’air, dans l’eau ou dans le sol sans chercher à comprendre l’évolution des procédés de production et donc souvent de la chimie elle-même, ou sans notion d’éco-toxicologie ? Cette même histoire ne gagne-t-elle pas à s’associer aussi à ceux qui tentent d’estimer ce que les écotechnologies peuvent faire aujourd’hui pour remédier, au moins partiellement, aux dégâts issus du passé qu’elle étudie, faisant ainsi un lien utile entre passé, présent et futur ? Les questions environnementales sont des questions hybrides, à la fois sociales, économiques et culturelles, naturelles et techniques, qui ne peuvent être traitées valablement par une seule discipline, aucune d’entre elles n’étant apte à saisir toutes les dimensions des problèmes.
Cependant, comme l’expérience des réseaux pluridisciplinaires du CNRS l’a montré depuis le début de ce siècle, la pratique de l’interdisciplinarité est un défi souvent difficile à relever. Les difficultés tiennent aux spécificités de disciplines qui se sont parfois constituées en opposition les unes aux autres, chacune ayant son vocabulaire spécifique, sa façon d’aborder les problèmes, de poser ses questions et d’apporter la preuve. Elles tiennent également à l’usage de certains types de sources, aux durées que celles-ci permettent d’étudier, et donc à la nécessité, pour travailler ensemble, d’emboîter des échelles de temps très différentes les unes des autres, allant de quelques millénaires à quelques années. À l’intérieur même des frontières disciplinaires, un fossé sépare (plus ou moins nettement selon les périodes) ceux et celles qui travaillent à partir de sources écrites ou orales et ceux qui travaillent à partir des « archives du sol », quelle que soit la méthode qu’ils emploient pour les faire parler. Surmonter ces difficultés fait partie des défis qu’il nous faut relever pour bénéficier de la richesse d’un regard multidisciplinaire sur des objets d’étude aussi complexes que ceux auxquels nous confronte l’environnement.
Pour ses dix ans, le Réseau universitaire de chercheurs en histoire environnementale (RUCHE) invite les chercheurs de toutes disciplines travaillant sur des sujets en rapport avec l’environnement à réfléchir aux sources, enjeux et méthodes disciplinaires, pluridisciplinaires et interdisciplinaires qui nous permettent d’enrichir nos connaissances dans les domaines évoqués ci-dessus. Ce colloque est né à l’initiative d’historien.nes du RUCHE mais il espère intéresser des chercheurs et chercheuses largement au delà de la seule discipline historique, des périodes récentes et même des sciences humaines et sociales. Des propositions émanant de toutes disciplines seront les bienvenues, sous la seule condition qu’elles touchent à l’histoire environnementale. Les organisateurs espèrent que les propositions reçues lui permettront de mettre la rencontre entre disciplines au cœur de ses sessions.
Ses objectifs seront de :
* faire un bilan des principaux apports et des renouvellements scientifiques récents, par les objets ou par les approches, en mettant en valeur les acquis d’expériences importants, mais également, le cas échéant, en discutant les éventuels motifs de déception ou les difficultés rencontrées dans la pratique de l’interdisciplinarité. Comment les projets sont-ils conçus ? Cherche-t-on et parvient-on à croiser les disciplines, plutôt qu’à les juxtaposer ? Quelle plus-value ce croisement apporte-t-il pour nos connaissances ?
* explorer des fronts pionniers ou les fronts négligés de la recherche en histoire environnementale, celle-ci étant conçue au sens très large d’approche, attentive à la temporalité, des interactions entre les sociétés et leur environnement.
* réfléchir aux usages actuels des différents types de sources, à leurs apports respectifs, aux problèmes que posent leurs croisements. Comment historiens, géographes, archéologues, chercheurs en écologie historique, etc., peuvent-ils dialoguer et enrichir mutuellement leurs pratiques ? Comment faire s’emboîter les différentes échelles de temps et d’espaces ?
* discuter l’utilité sociale de l’histoire environnementale. Très tôt, aux États-Unis, ce champ a participé à la « public history », une forme de science échangeant avec les collectivités publiques et cherchant à répondre à leurs besoins. Qu’en est-il en France où certains projets sont financés par un partenariat d’acteurs publics et privés ? Comment répondre aux demandes des acteurs du territoires, des élus pour que l’histoire environnementale contribue plus sûrement aux prises de décisions ? Quels problèmes spécifiques sont posés par la collaboration entre scientifiques et acteurs publics ? Quel langage adopter pour se comprendre ? À quelles limites se heurte, le cas échéant, la volonté d’utilité sociale de la recherche ?
Nous invitons les chercheurs et chercheuses intéressé.e.s à faire circuler cet appel dans leurs propres réseaux disciplinaires.
Conférenciers invités :
Christoph Bernhardt, Leibniz-Institut für Raumbezogene Sozialforschung, Berlin-Erkner (histoire urbaine et environnementale)
Martin Schmid, Alpen-Adria-Universität Klagenfurt in Wien (histoire du Danube et des cours d’eau)
Petra van Dam, Vrije Universiteit Amsterdam (histoire de l’eau à l’époque moderne)
Les propositions, de 5 000 signes maximum, devront être accompagnées de quelques lignes de présentation de leur(s) auteur(s) et adressées à Stéphane Frioux,
Date limite d’envoi des propositions : 20 novembre 2017
Une réponse sera donnée aux auteurs avant la fin de l’année 2017 après examen de leur proposition par le comité scientifique.
Les organisateurs sont en train de réunir les financements nécessaires au colloque. Ils espèrent être en mesure de prendre en charge l’hébergement des communicants mais ne pourront pas rembourser les frais de déplacement que les participants devront donc financer par eux-mêmes.
Comité d’organisation
Martine Chalvet, historienne, maître de conférences à Aix-Marseille Université, UMR TELEMME.
Florian Charvolin, sociologue, directeur de recherches au CNRS, Centre Max Weber.
Pierre Cornu, historien, professeur à l’université Lyon 2, Laboratoire d’études rurales.
Thierry Coanus, anthropologue, chargé de recherches à l’ENTPE, UMR Environnement Ville Société.
Marylise Cottet, géographe, chargée de recherches au CNRS, UMR Environnement Ville Société.
Anne Dalmasso, historienne, professeure à l’Université Grenoble-Alpes, Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes (LARHRA).
Stéphane Frioux, historien, maître de conférences à l’université Lyon 2, Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes (LARHRA), vice-président du RUCHE.
Nicolas Jacob, géographe, maître de conférences à l’université Lyon 2, UMR Archéorient.
Gwenaëlle Legoullon, historienne, maître de conférences à l’université Lyon 3, Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes (LARHRA).
Geneviève Massard-Guilbaud, historienne, directrice d’études à l’EHESS, Centre de Recherche sur l’Environnement et le Développement (CIRED).
Charles-François Mathis, historien, maître de conférences à l’université Bordeaux-Montaigne, CEMC, président du RUCHE.
Comité scientifique :
Mathieu Arnoux, historien médiéviste, Université Paris-Diderot/EHESS (sous réserve)
Philippe Barral, archéologue du monde celtique, professeur à l’Université de Franche Comté, directeur de la Maison des Sciences de l’Homme et de l’Environnement C.-N. Ledoux.
Sabine Barles, urbanisme-aménagement, professeure à l’Université Paris I, UMR Géographie-Cités.
Corinne Beck, historienne médiéviste et archéologue, professeure à l’Université Université de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis, directrice du Laboratoire CALHISTE.
Stéphane Frioux, historien contemporanéiste, maître de conférences à l’Université Lyon 2, UMR LARHRA.
Marc Galochet, géographe, professeur à l’Université de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis, laboratoire CALHISTE.
Didier Galop, géographe, directeur de recherches CNRS, directeur du laboratoire GEODE (Université Toulouse Jean-Jaurès), directeur de l’Observatoire Hommes Milieux du Haut-Vicdessos.
Anne Marie Granet-Abisset, historienne, Professeure à l’Université Grenoble-Alpes, UMR LARHRA.
Geneviève Massard-Guilbaud, historienne contemporanéiste, directrice d’études à l’EHESS, CIRED.
Charles-François Mathis, historien contemporanéiste, maître de conférences à l’Université Bordeaux-Montaigne, CEMC.
Raphaël Morera, historien moderniste, chargé de recherches CNRS au CRH (Centre de Recherches Historiques).
Richard Oram, historien médiéviste, University of Stirling (sous réserve)
Giacomo Parrinello, historien contemporanéiste, assistant professor en histoire de l’environnement, Sciences Po Paris, Centre d’histoire de Sciences Po.
Dieter Schott, historien contemporanéiste, TU Darmstadt (sous réserve)
Tim Soens, historien médiéviste, professeur à l’Université d’Anvers.
Mathias Tranchant, historien médiéviste, Université de La Rochelle, UMR LIENSs (Littoral, Environnement et Sociétés)
Et les membres du CA du RUCHE
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